Depuis la dernière ouverture des frontières en 2012, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, mais aucune véritable solution n’a vu le jour, si ce n’est celle de reconduire, année après année, la limitation de l’ouverture des cabinets médicaux. Ce printemps, les Chambres doivent proposer un nouveau système pour l’installation des médecins en pratique privée. Les idées ne se bousculent pas au portillon, hormis celle connue et entendue depuis des années relevant les caisses-maladie de leur obligation de contracter (c’est-à-dire de ne plus contraindre les assureurs à rembourser l’ensemble des prestataires de soins). D’autres propositions visent à instaurer une valeur différenciée du point tarifaire selon les régions du pays ou par spécialités, ou encore à fixer des limites qualitatives d’installation par région.
Le problème principal réside dans le fait établi que l’hôpital est pensé à rebours par rapport aux défis actuels et aux contraintes de la clause du besoin. Car les différents services médicaux ont besoin d’un nombre défini d’internes et de chefs de clinique pour répondre à la demande de la population et à l’activité médicale envisagée. Mais ces jeunes médecins ne pourront pas tous progresser dans la hiérarchie médicale et accéder à un poste de médecin-adjoint. Ils ne pourront, dès lors, rester dans l’institution. Cette forme pyramidale de la hiérarchie hospitalière a pour conséquence que nombre de jeunes collègues devront tôt ou tard s’installer en ville. La règle des trois ans en institution leur ouvre la porte d’une pratique privée ou dans l’un des centres médicaux existants. C’est là qu’un équilibre devrait être trouvé entre les départs à la retraite des médecins actuellement installés (dans de nombreuses spécialités la pyramide des âges est inversée) et les désirs de ces jeunes médecins de poursuivre leur carrière en ville. Il faut rappeler que les médecins étrangers, qui n’ont pas effectué ces trois années dans des institutions reconnues de formation en Suisse, doivent passer devant la Commission quadripartite qui donnera un préavis quasiment toujours négatif, sauf dans de très rares exceptions, pour l’obtention d’un droit de pratique à charge des assurances de base.
Les représentants des pédiatres genevois sont venus récemment à l’AMGe exposer la problématique du nombre croissant de médecins en charge des plus jeunes patients. A l’aide d’une étude rondement menée et chiffres à l’appui, ils tirent la sonnette d’alarme sur l’excès de pédiatres pouvant actuellement facturer à charge des assureurs. Ils seront entendus prochainement par la Commission quadripartite composée de représentants des HUG, de l‘AMIG, des établissements privés et de l’AMGe sous l’égide du médecin cantonal et des services du Département de la santé. D’autres spécialités avant eux ont manifesté leurs craintes de voir s’installer autant de collègues en ville. La démarche des pédiatres n’est donc pas isolée. Elle a le mérite d’être étayée par des chiffres d’une grande clarté.
On le voit, la planification médicale doit être rapidement et globalement revue dans notre canton et, dans l’attente de la décision du parlement national, qui pourrait être catastrophique (ouverture des frontières), délétère (fin de l’obligation de contracter, qui devrait alors être combattue par un référendum) ou quasiment inapplicable (variation de la valeur du point tarifaire), c’est localement, entre partenaires, que nous devons trouver les meilleures solutions pour permettre à nos jeunes collègues de poursuivre leur profession sans craindre une impasse avec la fin d’un contrat institutionnel et un refus d’installation en pratique privée. Cet équilibre doit être au cœur de la réflexion, tenant compte bien évidemment des demandes de la population en termes de soins, de prise en charge médicale et de délais d’attente, mais aussi de la forte inquiétude liée à la lourdeur des primes d’assurances-maladie.